Accélération du développement de médicaments et de vaccins grâce aux sciences omiques

Par Iva Fedorka

Le développement de médicaments – de la découverte initiale au médicament final – est un processus long et coûteux. Aujourd’hui, la génomique, la protéomique et d’autres nouvelles technologies contribuent à accélérer le développement de médicaments et à en accroître l’efficacité.

Actuellement, de nombreuses compagnies de recherche pharmaceutique, d’autres sociétés pharmaceutiques, des entreprises de biotechnologie et des institutions de recherche participent à la production de médicaments et de vaccins efficaces contre la COVID-19. Les entreprises assurant le développement des médicaments s’efforcent de travailler rapidement, même s’il est difficile de mener des essais cliniques pendant une pandémie. Elles tentent de créer de nouveaux médicaments et de repositionner des médicaments déjà approuvés pour d’autres maladies. L’innocuité et l’efficacité des vaccins doivent être prouvées, et des limites strictes s’appliquent aux tests de préapprobation avant l’administration à des personnes en bonne santé.

Contexte

Aux États-Unis, plus de dix ans et des centaines de millions de dollars peuvent être nécessaires pour mettre un seul nouveau médicament sur le marché. Des protocoles détaillés et des exigences administratives contribuent à un taux d’échec élevé pour la plupart des nouveaux candidats-médicaments. Par exemple, sur les 5 000 médicaments composés qui font l’objet d’essais précliniques, seulement cinq risquent d’être réellement testés dans le cadre d’essais cliniques chez les humains et un seul approuvé pour un usage thérapeutique1.

Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) est la principale responsable de la surveillance des médicaments, des produits biologiques et des vaccins. Les entreprises assurant le développement des produits thérapeutiques et des vaccins doivent obtenir l’approbation de la FDA avant de pouvoir étudier ou commercialiser ces substances.

Avant de pouvoir commencer les essais chez les humains, il faut recueillir des données précliniques significatives et déterminer les doses toxiques pour garantir l’innocuité pour l’humain. La toxicologie, la pharmacologie, et les sciences métaboliques et pharmaceutiques constituent le coeur du développement préclinique.

Le développement d’un nouveau médicament comporte plusieurs phases :

  • Synthèse et extraction de nouveaux composés;
  • Dépistage biologique et tests pharmacologiques;
  • Formulation du dosage et tests de stabilité;
  • Toxicologie et tests d’innocuité (in vivo);
  • Évaluation clinique (phases I, II et III);
  • Processus de fabrication et contrôle de la qualité;
  • Études de biodisponibilité;
  • Recherche post-approbation.

Génomique

La grande accessibilité du séquençage génomique a fait passer le développement de vaccins et de produits thérapeutiques de méthodes microbiologiques à des méthodes basées sur les séquences. La génomique, la transcriptomique, la métabolomique, la génomique structurale, la protéomique et l’immunomique peuvent aider à définir des cibles, à concevoir de nouveaux vaccins et médicaments, et à mieux prédire les effets sur les patients. La génomique humaine permet également de mieux comprendre la biologie de l’hôte, ce qui est important dans le cas des maladies infectieuses.

Les analyses de puces à ADN sont déjà devenues des outils standard pour l’étude des niveaux et des schémas de transcription dans les cellules, et les progrès de l’électrophorèse sur gel à deux dimensions et de la spectrométrie de masse permettent de mieux comprendre la fonction de produits géniques spécifiques. Une compréhension complète du protéome doit tenir compte des modifications post-traductionnelles des protéines qui déterminent l’emplacement, la stabilité, l’activité et la fonction intracellulaires.

Le fait de se fier exclusivement aux niveaux d’ARNm pour mesurer la function des protéines peut être trompeur; des informations sur les niveaux et les modifications des protéines, sur les voies de signalisation, ainsi que sur les concentrations et la distribution des métabolites sont également nécessaires.

Protéomique

La génomique fonctionnelle, une combinaison de protéomique et de transcriptomique, offre un moyen systématique de définir les voies et les processus biologiques dans des états physiologiques normaux et anormaux. Les méthodologies à cadence élevée et à grande échelle ainsi que les analyses statistiques et computationnelles peuvent étendre les recherches au-delà des gènes et des protéines uniques à des milliers de gènes et de produits géniques. Les fonctions biologiques d’environ 30 % du génome humain étant encore inconnues, les scientifiques passent de la cartographie et du séquençage génomiques à des approches de génomique fonctionnelle afin d’acquérir de nouvelles connaissances sur les systèmes biologiques.

La génomique fonctionnelle, jumelée à la chimie combinatoire et aux informations provenant des nouvelles méthodes de protéomique, aide à définir de nouvelles cibles médicamenteuses. Certaines entreprises criblent virtuellement des banques de composés existants pour des prévisions in silico : des combinaisons uniques d’essais biochimiques, de radiocristallographie, d’informatique et de criblage de banques de composés et de produits chimiques peuvent accélérer le processus de découverte de médicaments.

Vaccins

Les vaccins sont une grande réussite de la santé publique pour éradiquer des maladies comme la variole et la polio. Nous ne comprenons toutefois pas encore parfaitement comment les gènes et les protéines induites par les vaccins contribuent aux réponses immunitaires protectrices innées et adaptatives.

La protéomique peut aider à définir de nouveaux antigènes potentiels avec une plus grande rapidité et sensibilité. En complément aux approches transcriptomiques, la vaccinologie systémique nous aide à comprendre la réponse immunitaire après la vaccination. Les progress de la biotechnologie et de l’immunologie moléculaire ont fourni de nouvelles connaissances aux fabricants de vaccins.

Par exemple, les concentrations d’anticorps sériques sont une des mesures permettant de savoir si un vaccin a provoqué la réponse immunogène voulue. On évalue généralement une plage de doses et plusieurs voies d’administration pour décider de la dose finale et du schéma posologique. L’évaluation initiale des réponses immunitaires après la vaccination a lieu lors des essais de phases I et II; les essais de phase III évaluent l’efficacité une fois les résultats préliminaires sur l’innocuité et l’immunogénicité du vaccin disponibles.

Les données biologiques quantitatives disponibles grâce au projet du génome humain, ainsi que les innovations en matière d’instrumentation, de réactifs, de méthodologies, de bio-informatique et de logiciels transforment la découverte et le développement de médicaments. Des méthodes de découverte de médicaments à cadence élevée, notamment génomiques, protéomiques et métabolomiques, permettront un développement accéléré et des traitements sûrs, efficaces et mieux ciblés.

1 Sandra Kraljevic, Peter J. Stambrook, and Kresimir Pavelic, Accelerating drug discovery, EMBO Reports, 2004 Sep; 5(9): 837–842.

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Reference